IZNOGOUD : MOI, CALIFE…
France – 2021
Genre : Comédie
Scénariste : Jul, Laurent Vassilian, Olivier Andrieu
Illustrateur : Nicolas Tabary, Elric
Éditeur : IMAV Editions
Pages : 48 pages
Date de Sortie : 21 octobre 2021
LE PITCH
L’ignoble vizir Iznogoud revient dans une forme éblouissante, prêt à toutes les ignominies pour enfin, devenir calife à la place du calife ! N’hésitant pas à s’entourer de tout ce que Bagdad la somptueuse compte de mages interlopes, de charlatans véreux et d’hommes de main sans scrupules, il ne recule devant rien pour piéger le bon Haroun El-Poussah : de l’échiquier enchanté qui escamote le perdant de la partie, aux toiles magiques de Dali Baba, Iznogoud multiplie les stratagèmes tordus pour arriver à ses fins.
L’anaphore de l’échec
Comme les autres héros inoubliables scénarisés par René Goscinny, l’ignoble mais hilarant Iznogoud n’a jamais vraiment mis le holà sur ses exactions. Voici donc en 2021 la sortie d’un trente et unième album qui sans la renouveler, sait au moins appliquer la bonne formule.
Comme Astérix, Lucky Luke et consorts, Iznogoud aura finalement survécu à ses créateurs, Jean Tabary reprenant seul la destiné du personnage à partir de 1977, puis le laissant finalement orphelin à son tour en 2011. Depuis, au sein de la maison IMAV fondée par Anne Goscinny et Aymar du Chatenet, la série a repris son cours avec à son bord une nouvelle génération d’auteurs et l’illustrateur Nicolas Tabary, fils de et très efficace porteur de flambeaux. Une affaire qui roule et qui aboutit aujourd’hui à ce Moi, Calife… venant rappeler les dangers de l’ambition dévorante quelques mois seulement avant les prochaines élections présidentielles. Toujours aussi avide, jaloux, calculateur et machiavélique, Iznogoud en veut encore et toujours à la place confortable du grassouillet et benêt Calife Haroun El Poussah, mais va encore être la victime de la malchance (il faut le reconnaitre) et bien souvent tomber dans ses propres pièges. Une recette éprouvée mise en place dès le départ par Goscinny et Tabary, dont on retrouve ici tout aussi bien la pluie incessante de jeux de mots poussifs et de calembours tortueux, que ce sentiment très étrange d’être amené à prendre partie pour ce pauvre Iznogoud, grand méchant de la BD, mais éternel victime d’une profonde injustice.
Votez pour lui (ça ne sera pas pire que l’autre)
En reprenant la structure des premiers albums, soit en l’occurrence cinq courtes histoires en huit planches chacune, Moi, Calife… touche enfin du doigt l’efficacité de l’original, reproduisant cette succession rapide de gags et de dialogues bien fournis, qui donnait tout son charme à la BD. Pour contrer la popularité éternelle du Calife l’ignoble Vizir fait appel à l’un des conseillers de l’émir de Paris Anne-Ibn-Al-Go pour un grand moment de real politic, se procure un jeu d’échec ensorcelé, contacte un peintre qui a la particularité de transformer ses sujets en zombie ou réalise que le brave Calife n’a jamais passé ses examens officiels. Trois scénaristes se succèdent ici, dont le fameux Jul (déjà repreneur de Lucky Luke), mais c’est toujours le non-sens, l’absurde, qui prédomine et un jeu de va et vient toujours réjouissant entre l’univers joyeux des 1001 nuits et une actualité des plus contemporaines. Et ce ne sont pas les pauvres chômeurs envoyés à Pal-Emploi qui diront le contraire ! Coté dessins on peut observer ici les dernières planches de Nicolas Tabary qui quitte la série pour se lancer dans ses propres créations. Nouveau venu Elric qui signe les illustrations pour les deux dernières histoires manque encore de fermeté mais ne choque pas non plus outre mesure. Le génie pointu de Goscinny est inaccessible, et la précision du trait caractéristique de Tabary (père) restent un sacré sommet, mais la relève signe un album tout à fait plaisant et fidèle.