HELLBLAZER : RISE AND FALL
Hellblazer: Rise & Fall #1-3 – Etats-Unis – 2020
Genre : Fantastique
Scénariste : Tom Taylor
Illustrateur : Darick Robertson
Editeur : Urban Comics
Pages : 152 pages
Date de Sortie : 10 septembre 2021
LE PITCH
Un milliardaire est retrouvé empalé sur une flèche d’église. Un accident somme toute banal si l’on oubliait les ailes d’anges sanglantes de la victime. Ce qui ressemble au début d’une bonne histoire drôle est en réalité le point de départ d’une véritable hécatombe chez les hommes d’affaires de la City. Bloquée dans son enquête, la détective Aisha Bukhari fait appel à John Constantine, spécialiste de l’occulte et arnaqueur de première classe. Constantine découvre que ces meurtres pourraient être liés au premier décès dont il aurait été responsable, alors qu’il n’était qu’un gamin…
Blondes lights
Après avoir écumé les rues de Gotham dans Batman Damned, John Constantine revient au Black Label pour une minisérie solo : Rise and Fall. Du pur Hellblazer croisant gamins morts-vivants, démons de l’enfer, politicards véreux, pubs poisseux et mégots de Silk Cut, sous les bons hospices Tom Taylor et, surtout, de Darick Robertson.
Comme le veut la tradition, déjà bien posée, du Black Label, l’album en présence eb relève pas vraiment de la chronologie officielle du personnage, mais se présente comme un récit indépendant, sombre, violent et adulte certes, mais qui ne nécessite aucune connaissance sur les aventures passées ou futurs, du monsieur. Une entrée en matière idéale pour les nouveaux venus qui ne connaissent de Constantine que le long métrage de Francis Lawrence avec Keanu Reeves, la série TV de 2014 ou ses diverses apparitions aux cotés de Batman et consorts, voire moins. Et c’est sans doute ce qui a constitué l’une des motivations du scénariste Tom Taylor (DCeased, Injustice, Suicide Squad), nouvelle coqueluche de l’éditeur, qui s’efforce ici de regrouper toutes les caractéristiques attendues d’un épisode des joyeuses aventures de Constantine : un ancien péché qui lui revient dans la gueule, des anges qui tombent du ciel et s’écrasent au sol ou s’empalent sur le toit des églises, des représentants du gouvernement et des richards qui vendent leurs âmes, un démon qui tente de la faire à l’envers, un Satan incarné finalement très bon pote de biture et quelques potes qui, forcément, subissent les pots cassés… On se croirait en l’occurrence revenu à la belle époque du run de Garth Ennis, la pertinence et l’originalité en moins.
Le diable est dans les détails
Car si l’humour noir est irrésistible, si la trame se suit avec plaisir et que notre salopard anglais préféré à l’air de s’amuser comme un fou dans ce sacré bordel, il manque clairement une once de tension, un soupçon d’horreur plus viscérale et une véritable noirceur dans le tableau général. Là où la charge politique avait dans les grandes heures de Jamie Delano une pertinence presque visionnaire, une hargne punk, elle semble ici presque accessoire, plaquée sur une enquête dont la portée est plus biblique qu’autre chose. Même sensation de rester en surface lorsque Tom Taylor aborde la possible bisexualité de John Constantine, pour au final tourner le sujet en dérision avec une grosse gamelle échangée dans les chiottes avec le grand cornu. De l’irrévérence un peu forcée, dont le principal souci est de passer après une pelleté d’auteurs dont c’était la spécialité. A défaut d’un brûlot outrageant, Rise and Fall restera une sympathique virée, grand-guignolesque et délurée de plus dans la vie de l’homme au trenchcoat. Pas le travail de l’illustrateur Darick Robertson qui va sans doute laisser des traces et en tout cas semble ici une évidence. S’il n’avait jusque-là dessiné l’univers trash de Constantine qu’au détour d’un épisode de DCeased, l’artiste de Transmetropolitan et de The Boys, affirme son portrait du personnage, à la fois charmant et grossier, classieux et crasseux. Une vraie réussite. Il se hisse parfois même aux auteurs d’un Steve Dillon, mais creusant peut-être plus encore l’aspect grotesque de l’ensemble par un trait gras, des visages épais et intensément expressifs. Quelque chose de poisseux, de révulsant qui convient parfaitement au Liverpool de John Constantine et qui donne vraiment envie de revoir l’artiste s’y frotter sous peu.