HAWKMOON T.1 : LE JOYAU NOIR
France – 2022
Genre : Science-Fiction, Fantasy
Scénariste : Jérôme Le Gris
Illustrateur : Benoit Dellac, Didier Poli
Éditeur : Glénat
Pages : 56 pages
Date de Sortie : 07 septembre 2022
LE PITCH
Les Granbretons… ce nom résonne depuis des décennies dans tous les territoires d’une Europe dévastée. Après la chute des derniers grands Etats, le Roi-Empereur dégénéré et ses armées exercent une domination sans partage sur le Vieux Continent. Si le Ténébreux Empire continue d’étendre son pouvoir dans ce monde postapocalyptique, bientôt nul ne pourra guider les nations de l’Europe vers la liberté. Même la puissante cité de Köln, dernier bastion de la résistance, vient de céder sous les coups de l’ennemi. Son seigneur, le duc Dorian Hawkmoon, victime d’une infâme manipulation technologique dans les noires prisons de Londra pourra-t-il continuer le combat dans l’ombre ?
L’Autre légende
Après l’adaptation particulièrement réussie de la saga d’Elric, Glénat se penche désormais vers un autre digne représentant du Champion éternel cher à Michael Moorcock : Hawkmoon. Un nouveau héros tragique, un autre monde corrompu, une autre grande réussite.
Toute l’œuvre, ou presque, de Michael Moorcook se regroupe sous la bannière d’un Champion éternel combattant le mal sous toutes ses formes dans un multivers foisonnant où se croiserait même parfois certains de ses personnages les plus célèbres. Un concept qui va rapidement faire tache d’huile, et en particulier du coté des comics (le MCU ?), et auquel se rattache directement le cycle d’Hawkmoon, troisième « incarnation » juste après le Michael Caine du Guerrier de Mars, beaucoup moins connu. Répondant parfois comme une variation directe de certaines visions d’Elric, Hawkmon établie un futur ravagé par une catastrophe planétaire ayant entrainé un retour au Moyen âge, mais où substituerait quelques restes de technologies d’autrefois. Toujours aussi perfide, belliqueuse et prompte à se plier à un dictateur morbide, la Granbretanne s’efforce d’annexer cruellement le reste de l’Europe, ravageant les terres conquises, massacrant les populations jusqu’aux frontières encore indépendantes de la Kamarg.
Pierre de rune
Machines de morts et sciences dévouées en magie noire, le fier duc Dorian Hawkmoon se retrouve affublée d’une pierre noire sur le front l’obligeant à se soumettre aux ordres du terrible Roi-Empereur. Bien moins célèbre qu’Elric et surtout moins souvent adapté en BD (le comics de 1988 est tout de même des plus fantaisistes), la saga de Moorcook reprend littéralement vie ici, profitant une nouvelle fois d’un soin admirable dans son adaptation, l’écriture de Jérôme Le Gris (Serpent dieu, Horacio d’Alba) retrouvant toute la prestance et l’efficacité du texte original tout en fluidifiant ses échanges, tandis que la partie graphique impose à nouveau une vision dantesque et imposant d’un univers largement pompé à droite à gauche depuis. Mois opulent que le baroque acéré des albums précédents, les environnements d’Hawkmoon mélangent paysages décharnés à peine sortis des ombres et cités Art Nouveau aux atours steampunk avec une emphase opératique spectaculaire. On reconnait certainement la patte de Didier Poli (Neige Fondation, Seigneurs de guerre) œuvrant à nouveau comme storyboarder de luxe et grand architecte, tandis que Benoit Dellac (Nottingham, Serpent Dieu) vient achever une mise en forme éclatante. Si la trame ne fait que se mettre en place dans ce premier tome intitulé Le Joyau noir, l’équipe créatrice est déjà parfaitement en place et concrétise une vision solide et à la hauteur de la fresque imaginée par Moorcook, avec un petit soupçon de modernité bienvenue. Une réussite.