GUERRES D’ARRAN T.1 : LA COMPAGNIE DES BANNIS
France – 2023
Genre : Heroic Fantasy
Dessinateur : Brice Cossu
Scénariste : Jean-Luc Istin
Nombre de pages : 76 pages
Éditeur : Soleil Éditions
Date de sortie : 22 mars 2023
LE PITCH
Dunnrak et Hidden ont créé la compagnie des bannis avec un objectif : détruire la veuve noire, l’alliance visant à droguer les anciennes races pour les anéantir. Aidé du troublant mage Altherat, Dunnrak décide de frapper fort en s’attaquant à l’un de ses fondateurs : le roi du Venkor. En les provoquant de la sorte, il pourrait déclencher une guerre comme jamais les terres d’Arran n’en ont connue.
Terres en flammes
Certainement pour célébrer les dix ans de la création de la collection dédiée au Monde d’Aquilon, son créateur Jean-Luc Istin le plonge dans une guerre globale et dévastatrice. Un crossover ambitieux découpé en six tomes avec comme illustrateur inaugural ni plus ni moins que Brice Cossu, devenu une star de la BD depuis sa prestation sur la renaissance de Goldorack. Dans tous les cas, le résultat est impressionnant.
Regroupant déjà presque une centaine d’albums sous les appellations de séries Elfes, Nains, Mages, Orcs et Gobelins et le petit dernier Terres d’Ogan, l’univers Fantasy ré-imaginé par Jean-Luc Istin et ses nombreux collègues invités, a finalement des petits airs de concurrent des méthodes du comic, multipliant les one shot, les apparitions de héros et ennemis partagés d’un titre à l’autre, et traçant peu à peu des lignes qui vont dans la même direction d’un univers ample, complexe, habité et cohérent. Si déjà des évènements avaient traversé latéralement plusieurs albums comme « la guerre des goules » et sa sorcière nécromant conquérante, Guerre d’Arran pousse la logique encore plus loin faisant échos à quelques bribes croisées de-ci de-là, mais surtout ravivant la mémoire de nombreux personnages, héros, rois, sorciers ou vieux ennemis, invoquant tous les peuples connus, pour les plonger dans un affrontement guerrier sans pareil. D’autant plus logique, qu’Istin ne fait ici qu’échauffer des tensions qui existaient depuis bien longtemps entre les royaumes humains et les anciennes races.
Héros et martyrs
Et les évènements sont déjà bien avancés lorsque débute ce premier tome où l’on découvre comment les rois humains ont mis en marche une logique implacable d’affaiblissement et d’élimination de leurs ennemis en diffusant généreusement une nouvelle drogue ciblée. Seule finalement une petite troupe composée d’un petit groupe hétéroclite de guerriers (orc, gobelin, elfe noir…) s’efforce d’en stopper la propagation en multipliant les attaques sur les lieux de production ou de stockage, mais l’orc Dunnrak voudrait passer à une plus grande échelle. La guerre n’est pour l’instant pas totalement déclarée, mais le scénariste dépose très habilement ses pièces et scrute comment le conflit va définitivement basculer, laissant le lecteur s’attacher à la petite troupe faite d’ancienne figures et de nouveaux venus, observer leur montée en puissance alors même qu’un étau (traitrises, traitrises !) se resserre autour d’eux. Questions politiques, stratégiques, mais surtout épiques puisque les 70 pages étendues (l’album ne devait au départ en compter qu’une cinquantaine) savent mettre en avant une fresque guerrière spectaculaire et puissante. Définitivement incontournable depuis le succès de l’album français dédié à Goldorack, Brice Cossu fait une nouvelle démonstration de ses talents, s’inscrivant à merveille dans l’esthétique classique de la série, tout en y apportant une nouvelle précision dans le trait, des décors toujours évocateurs et surtout des planches à la dynamique percutante, fouillée et fluide. Du travail de pro de bout en bout, bourré de surprises, passionnant et doté d’une double lecture sur le traitement des minorités dans le monde réel assez subtile et pertinente. Le Monde d’Aquilon est en très grande forme.