GLACÉ
France – 2022
Genre : Policier
Scénariste : Philippe Thirault
Illustrateur : Mig
Éditeur : Philéas
Pages : 112 pages
Date de Sortie : 15 septembre 2022
LE PITCH
Le commandant Martin Servaz se voit confier l’enquête la plus étrange de toute sa carrière : les ouvriers d’une centrale hydroélectrique découvrent le corps sans tête d’un cheval, accroché à la falaise d’une vallée encaissée des Pyrénées.L’ADN d’un criminel interné à l’asile proche est retrouvé sur le corps du cheval… et quelques jours plus tard, le premier meurtre a lieu. Aidé par la capitaine de la gendarmerie Irène Ziegler, il va devoir mettre fin aux agissements d’un criminel diabolique.
Les pieds dans la neige
Premier roman signé Bernard Minier, Glacé avait déjà eu les honneurs d’une adaptation en série TV pour M6. Voici désormais la version BD. Un unique album mais plutôt copieux, qui s’efforce de maintenir le suspens et la tension dans cette première affaire du désormais célèbre Martin Servaz.
Grand Prix du roman francophone au Festival du Polar de Cognac en 2011, régulièrement cité parmi la liste des meilleurs essais du genre de ces dernières années, vendu à plus de 750 000 exemplaires, Glacé est donc aussi devenu le point de départ d’une série de textes consacrés au détective récurent Martin Servaz, incarné au petit écran par l’excellent Charles Berling. Joli petit standing auquel a dû s’attaquer Philippe Thirault, déjà responsable de l’adaptation de Les Voleurs d’après Pascal Bruckner, ayant la lourde tache de résumer les grandes lignes d’une affaire qui multiplie les enquêtes parallèles, met en place de nombreux détails brumeux, une belle poignée de personnage et même les premières bribes de la vie privée du personnage principal. Là où le roman prenait naturellement son temps pour mettre en place sa trame, la bande dessinée de Glacé, malgré sa bonne centaine de pages, semble s’imposer une certaine urgence, un découpage plus rapide et quelques ellipses ou raccourcis pas toujours des plus fluides.
Calme blanc
Reposant énormément sur son ambiance lourde, le souffle froid qui semble glisser constamment dans le dos des protagonistes et sur l’épaisseur de ses figures humaines, Glacé manque ici d’aisance, réduisant ses personnages à quelques figures usuelles pour la plupart et surtout fait ressortir toutes les faiblesses d’une trame finalement assez connue. Une ambiance montagnarde et des secrets sordides dignes d’un Jean-Christophe Grangé, une relation tendue entre Servaz et un serial killer insaisissable compressant les Dragon Rouge et Le Silence des agneaux de Thomas Harris. Heureusement malgré ces faiblesses, l’album garde une structure efficace, profilant beaucoup il faut l’avouer de l’excellente prestation de Mig. Ancien illustrateur phare de l’écurie Ankama sur des titres comme Les Chroniques de Wakfu ou Ogrest, il avait collaboré en 2016 avec Frank Thilliez pour une adaptation de son roman Puzzle, l’artiste a encore fait un bond artistique en avant affirmant son trait épais mais emprunt de finesse, des contours réalistes mais expressifs, et un travail sur les matières et les décors dont les détails viennent surtout inspirer une atmosphère puissante et marquante. Dans son utilisation des lavis, dans des couleurs qui tirent fermement vers le noir et blanc, son coup de crayon semble se rapprocher de plus en plus du travail d’Eric Powell tout en marquant sa différence dans le paysage de la BD française. Son découpage, son sens du cadrage, sa fluidité narrative feraient presque gracieusement oublier les petites faiblesses de ce Glacé, psycho-thriller reconnu mais loin d’être révolutionnaire.