FÉES DES SIXTIES T.1 : LES DISPARITIONS D’IMBOLC
France – 2023
Genre : Fantastique
Dessinateur : Giulio Macaione
Scenariste : Jul Maroh
Nombre de pages : 56 pages
Distributeur : Les Humanoïdes associés
Date de sortie : 1er février 2023
LE PITCH
Fraîchement débarquée à Londres pour intégrer un grand journal quotidien, Ailith est sollicitée par son ami d’enfance, Elliot, policier anti-fées, qui les accuse de tous les problèmes majeurs depuis leur arrivée dans la capitale anglaise. Plusieurs personnes ont disparu le 1er février dans des conditions plus qu’étranges et le policier est persuadé que c’est un coup des créatures magiques. Son enquête mène la jeune reporter au cœur de la forêt, où elle fera une rencontre …
Ailith in the Sky with Diamonds
Nouvelle collection et nouvel univers pour Les Humanoïdes associés avec Fées des sixties. Quatre tomes sont déjà annoncés pour cette année 2023 avec à chaque fois une équipe différentes aux commandes. Il fallait bien ça pour replonger dans un swinging london désormais habité par des créatures aux ailes transparentes.
S’il n’interviendra directement que pour le second album, L’Ange de Manchester, Gihef (Sirènes & Vikings, Enchainés…) est bel et bien à l’origine de cette nouvelle série anthologique et le directeur de collection. L’idées est finalement assez simple : une version revisitée de l’ère la plus colorée de nos voisins britishs où le royaume des fées aurait finalement ouvert ses portes sur le nôtre. Largement humanoïdes et avec comme seules différences leurs fameuses ailes insectoïdes, les fées se promènent donc presque le plus naturellement du monde dans les rues de Londres et les autres grandes villes du Royaume-Uni. Et si le gouvernement (travailliste) au pouvoir tente de faciliter leur immigration par le biais de lois et de décrets inclusifs toute la population n’est bien entendu particulièrement réjouie de leur arrivée. On connait la rengaine : ils ne sont pas comme nous, ils s’habillent bizarrement, ils ne partagent pas notre culture, volent nos femmes et notre travail… Rien de bien neuf sous le ciel de la xénophobie ordinaire, et ce premier tome de Fée des Sixties joue d’autant plus parfaitement sur cette double lecture historique et sociétale, qu’elle se couple avec une réflexion autour de l’identité sexuelle et de la représentativité normée.
All you need is…
Rien de bien étonnant puisque Les Disparitions d’Imbolc a été écrit par Jul Maroh auteur.e de Le Bleu est une couleur chaude (à l’origine du film La Vie d’Adèle), City & Gender ou Corps sonores, et qu’il continue donc de questionner la notion d’identité, d’appartenance et de liberté, mais au sein de cet univers fantastique. La jeune journaliste Ailith, elle-même perturbée par des rêves perturbant et manifestement troublée par cette fée androgyne qui réclame son aide, doit faire la part des choses entre sa méfiance héritée de son environnement (en particulier d’un policier et ami d’enfance homophobe) et ses propres élans face à cette nouvelle population paganiste qui qui lui tend les bras. Joli voyage qui fait facilement oublier une petite trame vaguement policière autour de disparitions non élucidée et une résolution sans doute peu trop simpliste. Jul Maroh délaisse la BD d’auteur mais préserve son identité avec une belle idée de la continuité offrant un voyage au final volontairement léger et coloré, comme porté par les accents acidulés de la pop british de l’époque. Une direction qu’a parfaitement embrassé l’artiste italien Giulio Macaione (Sirocco, Basilico) avec des illustrations toujours douces, des lignes fluides et délicates où les corps et les visages ne prêtent jamais immédiatement à une interprétation trop sexuée. C’est classique mais toujours joli, et surtout retrouve l’esthétique flower power entre les décors orangés, les chevelures longues et les pattes d’ef’ sans trop verser dans le cliché. A voir maintenant si les tomes suivants réussiront à croiser un peu plus efficacement le combat contre les discriminations et les contours plus fermes du polar fantastique.