FÉES DES SIXTIES T.2 : L’ANGE DE MANCHESTER
France – 2023
Genre : Fantastique, Thriller
Dessinateur : Alberto Zanon
Scénariste : Christian Lachenal, Gihef
Nombre de pages : 56 pages
Éditeur : Les Humanoïdes Associés
Date de sortie : 05 avril 2023
LE PITCH
Attirée par les lumières des sixties, la fée Anann quitte sa forêt pour poursuivre son rêve de devenir chanteuse. Derrière l’apparat de la ville, elle va découvrir la brutalité et la dangerosité du monde des humains. Heureusement, elle rencontre Stella, une humaine qui la prend sous son aile et dont elle va rapidement tomber amoureuse. Quand Stella disparaît dans d’étranges conditions, Anann se lance à sa recherche et se confronte aux aspects les plus sombres de la société humaine.
Last Night in Cathedrale Street
Second album de la nouvelle et curieuse collection Fées des sixties avec comme prévu un changement d’auteurs et une tout nouvelle histoire mais qui prend à nouveau comme contexte cette Angleterre yéyé où les royaumes féeriques seraient plus qu’un simple conte pour petites filles.
Comme son nom l’indique donc Fées des sixties est une série d’albums (deux autres sont déjà annoncés) qui prend racine dans une réalité alternative où le peuple des fées, si présent dans le folklore celte, se seraient avéré une réalité et aurait finalement révélé son existence en plein cœur d’un Royaume-Uni déjà bien chamboulé par les bouleversements musicaux, culturels et sociétaux des années 60. Une culture du rock et de la mode qui fascine d’ailleurs Anann, jeune fée fan des Rolling Stones et qui s’imagine elle aussi future star de la musique. Un peu naïve, trop rêveuse, la demoiselle décide de quitter son propre monde pour partir à l’aventure à destination de Manchester. Et comme beaucoup avant et après elle, elle va être confrontée à une humanité beaucoup moins progressive qu’elle l’espérait, devant subir les remarques racistes, le rejet généralisé des fées et même un regard plus que noir sur son histoire d’amour naissante avec une humaine.
Like a Rolling Stone
Comme pour le précédent Les Disparitions d’Imbolc, le cadre de ce second album sert bien évidemment d’allégorie au travers du monde bien réel, entre xénophobie et homophobie, là où justement le fameux esprit des sixties ne peut en définitive pas dissimuler toute la violence d’une décennie faite d’espoirs, de couleurs vives, d’encens et d’utopies mais aussi de brutalités et de vices. Le solide Gehef (Alamander, Sirènes et vikings, OSS 117), associé ici au débutant Christian Lachenal, ajoute d’ailleurs à cette exploration plutôt sentimentale une trame secondaire plus sombre encore en imaginant un couple de pervers kidnappant les jeunes gens à la mode après des soirées arrosées pour leur faire subir de multiples tortures comme un exutoire à une société qu’ils jugent trop décadente. Des accents de récit policier, de thriller limite glauque, qui viennent encore une fois creuser le fossé entre les aspirations de l’héroïne (qui va littéralement s’y bruler les ailes) et les dangers omniprésents auxquels elle s’expose, mais qui dispersent un peu l’efficacité sobre de l’album en ajoutant une poignée d’autres personnages secondaires qui n’auront pas totalement le temps d’être suffisamment explorés. Cela n’empêche cependant pas L’Ange de Manchester d’être une proposition intéressante et assez agréable, profitant une nouvelle fois d’une direction artistique très swing, avec des planches illustrées par Alberto Zanon (Hercule Poirot, Les Belles vertes) qui capturent joliment l’esprit de l’époque (costumes, coiffures, décors, couleurs…) et offrent aussi à Anann et sa compagne quelques moments tout en délicatesses.