FAR SECTOR
Far Sector #1-12 – États-Unis – 2019/2020
Genre : Super-héros, Space Opera
Scénariste : N.K. Jemisin
Illustrateur : Jamal Campbell
Éditeur : Urban Comics
Pages : 312 pages
Date de Sortie : 03 juin 2022
LE PITCH
La Green Lantern Jo Mullein vient d’être affectée à l’un des secteurs les plus reculés de la galaxie. En charge d’élucider un meurtre au sein de cette société qui n’a plus connu de crime depuis plusieurs siècles, elle devra non seulement affronter l’animosité ambiante mais également faire la lumière sur un second assassinat : celui du principal suspect.
Le vert est de saison
Maxi-série produite au sein du label Young Animal supervisé par Gerard Way, Far Sector est l’occasion de rencontrer une nouvelle Green Lantern, la novice Jo Mullein, mais aussi de découvrir la première incursion de la romancière N.K. Jemisin (Les Cent Mille Royaumes, Les Livres de la terre fracturée…) dans le monde des comics.
Sans être totalement hors canon, les productions Young Animal permettent tout de même à leurs auteurs de prendre un peu de distance avec les grands évènements DC. L’univers est le même, mais le ton y est souvent plus libre, plus personnel, plus auto-contenu. Si depuis l’héroïne de Far Sector a fait quelques fugaces dans d’autres publications de l’éditeur, elle est ici fraîchement émoulue de ses racines terriennes, envoyée pour sa première mission sur une planète très lointain, afin d’enquêter sur un meurtre. Un acte qui n’était pas arrivée depuis des siècles puisque les trois espèces vivant sur la cité éternelle ont banni, depuis avoir manqué de s’auto-détruire, tout forme d’affection. Des peuples rationnels, censés, calculateurs, logiques, totalement dépassés par la situation et qui vont devoir se reposer sur les capacités de Jo Mullein, ex-militaire et ex-flic, et surtout véritable bouillon de culture d’émotions en tous genres et parfois contradictoires. Un agent agitateur en somme, découvrant une civilisation étrangère, à l’organisation complexe et particulière que la scénariste explore avec beaucoup de précision, donnant corps à de nombreux détails historiques et politiques.
La shérif de l’espace
Une toile de fond omniprésente qui permet alors de construire autant un récit policier digne des vieux romans de gare avec trahisons, corruptions, crise sociale et mainmise des puissants, mais dans un environnement spectaculaire de space opera célébré par les couleurs explosives et les effets de lumière aveuglants de Jamal Campbell (Nightwing, Mighty Mophin Rangers, Naomi). Des planches qui en mettent plein la vue mais qui a l’instar de l’écriture ont parfois tendance à trop vouloir en faire, à noyer le lecteur sous les détails et la profusion d’informations. C’est particulièrement notable lors des scènes d’actions ou de batailles où les pouvoirs de la Green Lantern (pourtant bourrés de clins d’œil) se perdent au milieu des tirs lasers, des architectures bardées de néons ou des transformations informatiques d’une poursuite en royaume virtuel. C’est finalement quand la trame refroidit ses ardeurs que le monde de Far Sector prend vraiment forme, autant dans les excellents designs des aliens, humanoïdes ailés, végétaux carnivores conscients et créatures virtuelles se nourrissant de cultures et de mèmes, que dans le parallèle plus qu’évident que Jemisin fait avec cette société au bord de la révolution, et la nôtre. Mais si Far Sector reste une lecture accrocheuse et sur certains points marquante, c’est véritablement grâce à une nouvelle Green Lantern particulièrement charismatique que ce soit dans la réinvention moderne du fameux costume vert, que dans sa fougue, sa conscience politique, ses contradictions et sa profonde humanité. On espère vraiment qu’Oa lui réaffectera une mission à sa hauteur.