LES NOUVELLES AVENTURES DE FANTAX : ESPIONS SUR LA TAMISE & Ô VIEILLESSE ENNEMIE

France – 2025
Genre : Aventure, Action, Espionnage, Super-héros
Dessinateur : Jean-Michel Arroyo, Paskal Millet
Scénariste : Jean Depelley, Thierry Mornet
Nombre de pages : 56 et 68 pages
Éditeur : Connaître Chott
Date de sortie : 1er février 2025
LE PITCH
Espions sur la Tamise : Septembre 1949, le M.I.5 engage Lord Neighbour alias Fantax pour protéger l’Atomic Energy Rechearch Etablishment près de Oxford, le site de fabrication de la première bombe atomique britannique, surveillé par une puissance étrangère. C’est le début d’une longue aventure pour Fantax, qui retrouve au passage d’anciens adversaires devenus espions, avant d’être fait prisonnier des Soviétiques et déporté au goulag.
Ô Vieillesse ennemie : La fin des années 70. Les années ont passé… Et elles atteignent également Lord Horace Neighbour alias Fantax. Le justicier masqué va devoir mobiliser tout son courage et sa vivacité afin de sauver sa femme, Lady Patricia, touchée par une mystérieuse toxine mortelle. Neighbour se lance alors dans une course contre la montre, sur la piste d’immondes trafiquants entre New York et Paris. Et pour cela, il va revêtir une nouvelle fois le costume de Fantax, afin de faire régner la justice…
Le retour du Sup’héros
Retour en force pour le tout premier vrai super-héros hexagonal : Fantax. Un vigilante bien de chez nous qui connait depuis quelques années un petit regain d’intérêt avec la réédition complète de ses premières aventures, une apparition remarquée à la très cool attraction Étincelle du Futuroscope et même possiblement un long métrage évènement en préparation chez le studio parisien Imagineers Studio. Et dernières nouveautés, et pas des moindres, deux aventures totalement inédites contées par des auteurs de talents. Que demande le peuple (français) ?
Apparu dès 1946, ce brave Fantask, reconnaissable grâce sa cagoule noire, sa cape rouge et son F jaune pétant, fut imaginé par deux lyonnais, Marcel Navarro (signant en tant que J.K. Melwyn-Nash) et Pierre Mouchot (plus connu sous le pseudo de Chott), comme une grande déclaration d’admiration aux strip américains. Un peu de Batman, beaucoup du Fantôme du Bengal de Lee Falk, pas mal d’emprunt aux aventures exotiques (Tarzan par Burne Hogarth en particulier), le personnage séduit immédiatement les jeunes lecteurs français, fascinés par cet univers pulp inédit et surtout une frénésie de créativité embarquant le personnage d’un continent à un autre, d’un genre à l’autre. Autre particularité de Fantax, malgré son alter ego aristocrate anglais, celui-ci se montre assez violent et expéditif, n’hésitant jamais à prendre les armes et exécuter ses ennemis. Des planches véritablement ressuscitées par Tangy Mouchot, petit-fils de Chott donc, grâce à ses six belles intégrales aux éditions Connaître Chott. C’est ce dernier qui a aussi eu l’idée de prolonger la dynamique en proposant deux nouvelles grandes aventures inédites du personnage, toutes deux parfaitement intégrézs dans la chronologie du personnage. Deux albums et deux approches.
For Queen and Country
Espions sur la Tamise s’inscrit ainsi directement dans la continuité de la toute première série (achevée en 1949) en plongeant le héros costumé, devenu agent spécial au service de la Grande Bretagne, dans les affres des premières heures de la Guerre Froide. Des documents volés, des agents doubles, des poursuites au cœurs de la nuit avec une Lady Patricia plus sexy que jamais, le récit imaginé par Jean Depelley (Shieldmaster, Howard’s Barbarians…) retrouve avec bonheur l’atmosphère un peu surannée des récits d’espionnages d’autrefois, mais avec une énergie bien plus moderne. Ainsi même si la trame s’amuse à croiser la grande Histoire en se basant sur des figures et des évènements bien connus, l’action reste bien entendu toujours de mise avec de la castagne à tout va et même une évasion spectaculaire d’un goulag de Sibérie. Un album à l’atmosphère rétro assumée et forcément parfaitement mis en image par Jean-Michel Arroyo (Pigalle 1950), plébiscité depuis sa reprise « à l’ancienne » des aventures de Buck Danny, délivrant des planches efficaces, élégantes et aux ambiances presque feutrées parfaitement dans le ton.
Je ne vieillis pas, je prends de la valeur
Mais le suivant Ô vieillesse ennemie, fait encore mieux en propulsant le personnage dans des années 70 totalement inédites pour lui. Usé, plus massif, ayant raccroché le costume depuis de longues années déjà, il est obligé de reprendre du service lorsque la vie de son épouse est menacée par un produit de beauté anti-vieillissement qui s’avère spectaculairement mortel. De New York à Paris, un Fantax plus vénère que jamais remonte le fil d’un réseau de trafiquants qui va s’avérer lié avec un très vieil ennemi. Thierry Mornet, alias le Mr Comics de Delcourt mais désormais aussi créateur du Garde républicain, délivre un scénario relativement classique en apparence, mais tout à fait malin qui croise allègrement le passé et le présent du personnage, le confrontant autant à ses limites physiques qu’à sa place dans un monde plus brutal encore que le sien. Entre petits hommages au Silver Age et modernisation remarquable du personnage (le Dark Knight Returns devait trainer dans la tête), Ô vieillesse ennemie réussit surtout à embarquer le lecteur dans une aventure frénétique, bourrine, ultra violente et effrénée, succession presque ininterrompue de cavalcades sur les toits et d’affrontements des plus physiques contre une horde de gangster ou un culturiste mutant. Déjà collaborateur du scénariste sur le Garde Républicain, Paskal Millet (Underground Zombies, Seule l’ombre…) assure une prestation extrêmement énergique, percutante, alliant un trait nerveux à un découpage hardi et fluide rappelant là encore les grands de l’école américaine.
Deux beaux épilogues (ou ouverture vers une vraie résurrection ?), pour les aventures d’un Fantax qui a presque 80 ans n’a pas fini de rendre justice et fracasser la tronche des méchants. Il faut reconnaitre qu’avec ces deux équipes de nouveaux auteurs, le costume semble lui aller mieux que jamais.