EDENWOOD T.1
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Edenwood #1-5 – Etats-Unis – 2023 / 2024
Genre : Fantastique, Action
Dessinateur : Tony Daniel
Scénariste : Tony Daniel
Nombre de pages : 128
Éditeur : Delcourt
Date de sortie : 12 février 2025
LE PITCH
Rion Astor est un ado qui vit à William’s Bay, dans le Wisconsin. Parti à la recherche de sa petite amie disparue, il est happé dans un pays magique appelé Edenwood, un royaume multidimensionnel où une guerre féroce oppose sorcières et démons depuis des siècles. Rion est chargé de mener une escouade de tueurs de démons. Mais le véritable secret réside dans l’armure magique que Bastille, son mentor, lui a confectionnée.
Quête solitaire
Le passage à l’écriture de ses propres scénarii est une étape qui titille très souvent les illustrateurs de comics. Surtout lorsqu’ils sont en pleine phase ascendante, bien placés sur le podium. Après avoir solidement apposé sa marque du coté de la Bat-family aux coté de Tom King, le doué Tony Daniel se lance de le creator own chez Image avec Edenwood.
Devenu depuis quelques années l’un des maitres étalons du graphisme de l’écurie DC Comics, Tony Daniel, croisé autant du coté de Batman, Teen Titan que de celui d’Hawkman ou Deathstroke, avait commencé à prendre de la distance avec la série Nocterra, post-apo qui défouraille imaginé avec le scénariste Scott Snyder. Edenwood marque une marche supplémentaire, puisque désormais l’illustrateur est seul maitre à bord, auteur complet, qui se lance au passage dans la création d’un vaste et très complexe univers. Quelques contours bien connus autour d’un monde humain transformé et dévasté par une guerre venue d’ailleurs, celle qui oppose les sorciers et les démons, qui doit alors autant à une certaine Fantasy qu’à des effluves beaucoup plus proche du steampunk ou de l’horreur. De la Dark Fantasy comme dirait l’autre, faisant de Rion Astor, jeune orphelin quelques peu délaissé par les autres gamins, le héros d’une quête pour retrouver son amour de jeunesse, Adelai, emporté comme le reste de ses amis dans les limbes de l’Edenwood. Un lieu qui même après une bonne centaine de pages reste très mystérieux pour le lecteur (comme à peu près toute la « géographie » mise en place) qui ne sait jamais vraiment à quelques moments les personnages y mettent les pieds et quelles sont son apparence et ses limites.
Forgotten Realms
Pas totalement sûr d’ailleurs que cela soit parfaitement volontaire de la part de l’auteur qui ne choisit ici jamais la simplicité, refusant une narration linéaire au profit de multiples aller-retour temporels, de quelques voyages entre les lieux et les dimensions aux coupures à peine esquissées, et de nombreuses ellipses qui ont souvent tendance à nous perdre d’une scène à l’autre, d’un évènement à l’autre. Même sensation du coté de certains personnages secondaires balancés au détour d’une case, éliminés presque aussi rapidement, sans que l’on ne perçoive quel en est l’impact sur le fil narratif principal. Tony Daniel fourmille d’idées et d’envies et semble particulièrement fébrile à toutes les réunir dans sa première véritable œuvre solo. Dommage car au-delà de ce fouillis un peu rébarbatif, l’atmosphère baroque et décadente ne manque clairement pas de charme et de sens épique, en particulier dans sa manière de réinventer la filiation super-héros (ici par le biais d’une armure qui se transmet de maitre à élève ou par l’apparition de Teen pas Titans mais presque) à la sauce gothique et épouvante. Tony Daniel, le scénariste, peut clairement remercier Tony Daniel, le dessinateur, qui avec son trait mainstream ultra précis et élégant, ses poses dynamiques et ses idées de designs bien sexy vient constamment faire déborder l’histoire vers des planches grandiloquentes, violentes et spectaculaires, qui font passer tout ces errances à la trappes le temps de quelques planches.
Titre assez intriguant, mais malheureusement pour l’instant assez mal maitrisé dans sa construction, inutilement alambiquée et frôlant le trop plein, Edenwood n’en reste pas moins un incontournable pour les amoureux de Tony Daniel qui profiteront là encore d’une sacrée démonstration de talents graphiques, très comics, mais très classes.