DUNCROSS CONTRE LES CRÉATURES DU MAL

Crimson Fall : Lambs of God & The Shore Tower – Canada – 2025
Genre : Fantasy
Dessinateur : Derek Laufman
Scénariste : Derek Laufman
Nombre de pages : 88 pages
Éditeur : Les Aventuriers d’ailleurs
Date de sortie : 30 avril 2025
LE PITCH
Le père McKellen est l’assistant de Sir Duncross, un chevalier qui ne craint pas la peur. Il est témoin de toutes ses missions ayant pour but de purifier le monde des créatures du mal. Que ce soit dans une chapelle abandonnée ou en haut d’une tour près du rivage, Duncross est là pour les éliminer.
Le mercenaire et le moine en vadrouille
Artiste canadien ayant fait ses gammes du coté de l’animation ou du monde du jouet, Derek Laufman verse aussi de plus en plus dans la BD. Après le SF Bot-9 et les deux premières fantasy La Sorcière de Wickerson et Le Trésor des Terres de Ruines, l’artiste poursuit dans sa lancée avec Duncross contre les créatures du mal, geste médiévale qui ne manque pas de sorceleur… euh de sorcellerie.
Dans un monde et un temps inconnu, mais que l’on place aisément dans un contexte médiéval fantastique plutôt classique, un moine copiste, aussi bedonnant que pas tant courageux, engage un mercenaire endurci pour pourfendre les forces du mal. Dans le premier chapitre qui sert d’introduction, il s’agit d’un monastère, et de ses occupants, qui est possédé par l’esprit démoniaque du Roi rouge. Dans le second, plus long, le duo nouvellement formé s’embarque pour un voyage sur une île lointaine où un monstre aquatique massacrerait allègrement les soldats du seigneur local. Quelques considérations dialoguées pour poser le contexte, quelques planches de voyages, et l’essentiel se joue effectivement sur place, entre exploration de lieux sombres et désolés, de bâtisses de vieilles pierres particulièrement inquiétantes, et de batailles tranchantes contre les créatures voraces qui les habitent. Derek Laufman parcourt des chemins de terres battues bien connus des amoureux du genre, quelques parts entre l’univers sombre et pointu de The Witcher et un esprit plus pulp à la Mignola, réinvestissant quelques légendes (bibliques ou lovecraftienne) pour mieux se faire plaisir avec le crayon.
Par la croix et l’épée
Son trait bien rond, ses décors plus évocateurs que fouillés, son jeu sur des lignes plutôt épurées et une colorisation qui tend vers les aplats, donneraient presque à l’ensemble des airs de BD naïve, grand public, mais la légèreté peut cacher quelques petits effets sanglants, et une tonalité un poil plus adulte ou en tout cas ado. Le découpage est toujours réussi et efficace, mettant bien en valeur l’habilité guerrière du seigneur Duncross et l’efficacité imparable de sa lame, et l’artiste ne manque effectivement pas de talent pour donner du corps à ses impressionnants opposants. Ces derniers ne font cependant pas oublier que le père McKellen et le Sir Duncross n’ont rien de parfaits héros, et fonctionnent surtout comme un duo presque comique, échos en bure et en cote de maille des buddy movies où tout les oppose sauf leur mission. Le premier par foi, le second par appât du gain. Presque une parodie du grand récit chevaleresque, encadré à chaque fois par des pages en proses, comme échappées du manuscrit du moine, et dont le cadre de geste contraste de façon amusante avec ce qui va ou qui vient de se dérouler.
Une entrée en matière tout à fait sympathique et dotée d’une belle identité graphique, mais qui forcément doit encore creuser sa différence pour s’émanciper aux cotés d’imposantes références. Présenté comme un one shot (pas de numéro sur la tranche de la couverture), Duncross contre les créatures du mal a pourtant tout du premier tome encourageant. A voir si on retrouvera ou pas les deux compères dans de nouvelles aventures dans les temps à venir.