CONVOI
France – 2022
Genre : Action, Science-Fiction
Scénariste : Kevan Stevens
Illustrateur : Jef
Éditeur : Soleil
Pages : 132 pages
Date de Sortie : 07 septembre 2022
LE PITCH
Bienvenus dans une France en proie au chaos aux côtés d’ALEX, jeune guerrière au volant de son truck de combat, guidant un convoi chargé de médicaments, entre Le Havre et Marseille, au travers d’un territoire contaminé où le réchauffement climatique a anéanti toute idée d’humanité. Où règne la violence brute et où l’amitié, l’amour, la folie n’ont plus de repères…
Sex, Trucks & Rock’n’roll
Les auteurs de Mezkal appuient à fond sur le turbo pour une traversée sauvage d’une France ravagée post-effondrement. L’avenir est désespéré, la mission n’est que pur suicide, mais faudrait pas en perdre son humour non plus. Un post-apo Fast et surtout Furious qui comme son modèle Fury Road écrase tout, ou presque sur son passage.
Les premières pages ne sont pas là pour mettre du baume au cœurs : à l’horizon 2074 la terre a consumé ses dernières lignes de bonheur et après avoir été alerté des années durant, l’humanité s’est laissée emportée par la pollution, la surconsommation, les guerres civiles et nucléaires, la violence, les pires bassesses et la bêtise crasse. Pourtant l’humanité persiste comme un ténia accroché à son colon, à l’instar d’Alex conductrice de poids lourds et spécialiste des convois impossibles, sexy et grande gueule, à qui on a confié la mission totalement allumée de traverser la France du nord au sud pour ramener une couteuse cargaison de médicaments frelatés à Marseille. C’est partie pour la chevauché héroïque, camions armés, mini-tanks, motos et delta-planes se regroupant autour de la Boss dans un ultime sursaut digne d’un western crépusculaire. Impossible de passer à coté des nombreux emprunts à la saga séminale des Mad Max et en particulier à la construction en ligne droite du plus moderne des quatre, mais Convoi n’est pas assez bête pour se contenter de cela. S’écartant des habituelles colorisations pimpantes, des illustrations bien lisses et des découpages trop sages, Jef impose avec talent une esthétique sableuse, une palette passée, et un style graphique qui manie toujours aussi bien l’expressivité presque caricaturale avec l’énergie punk d’une époque révolue.
La Mort à l’arrivée
Boosté par une grammaire ultra musclée, constamment véloce voir carrément enragée, ses planches renouent avec l’esprit cartoon de certaines productions graphiques des années 80, alliant forcément la sur-stylisation d’un Frank Miller aux exactions de la généalogie de la revue Métal Hurlant, version française et anglaise. Visuellement ça dépote d’autant plus, que même si Convoi reste assez sobre sur les effets gores, il ne se refuse jamais quelques images de fesses et de sexe, et surtout un mauvais goût parfaitement assumé. Une version punk des Fous du volant, un La Course à la mort de l’an 2000 sur papier épais, où ces survivants de l’impossible traversent des paysages désolés, affrontent gangs pouilleux et sectes totalitaires et foireuses, mais aussi s’efforcent de cohabiter et de collaborer les uns avec les autres. Travaillant là aussi une écriture roublarde et outrageusement politiquement pas correcte du tout, Kevan Stevens s’amuse des frilosités polémiques du monde moderne et secoue les questions du genre, les affrontements viandards / végans, les respects des cultes, pour mieux donner vie à une sacrée bande de gueules cassées, d’anars bourrins, de ratés invétérés que l’adversité va irrémédiablement rapprocher (et plus si affinités) avant de joyeusement les massacrer. Beaucoup de mauvais esprit, un verbe bien pendu, un rythme qui décoiffe et une finition chromée font de Convoi l’album le plus explosif de la rentrée.