BRZRKR T.01
BRZRKR #1-4 – États-Unis – 2021
Genre : Science-Fiction, Action
Dessinateur : Ron Garney
Scénariste : Keanu Reeves, Matt Kindt
Nombre de pages :
Éditeur : Delcourt
Date de sortie : 15 mars 2023
LE PITCH
L’homme connu uniquement sous le nom de B est un guerrier immortel. Il est sujet à des accès d’ultraviolence… au détriment de sa raison. Après des siècles d’errance, B a accepté de travailler pour le gouvernement américain en prenant part à des missions trop dangereuses pour des mortels. En échange, B espère obtenir la vérité sur les origines de son existence… et surtout comment y mettre fin !
L’immortel
Évènement comic de l’année 2021 et concrétisation de la nouvelle iconisation de Keanu Reeves, BRZRKR est sa première entrée dans le monde de la BD en tant que créateur de sa propre série. Une aventure où on y reconnait ses traits bien entendu, mais aussi son univers pulp, entre arts-martiaux, science-fiction métaphysique et action décuplée par une violence particulièrement graphique. La légende est en marche ?
Redevenu une star du cinéma d’action grâce à la franchise John Wick, Keanu Reeves vient confirmer sa volonté de plus en plus évidente de façonner sa propre image de marque, sa propre légende. Exit d’une certaine façon les anciennes ambitions d’acteur intériorisé et fragile, toute sa carrière semble aujourd’hui tournée vers sa posture de héros de films musclés, bourrin mais chorégraphiés. Un écho direct de sa renaissance matrixienne, mais aussi de passions on ne peut plus personnelles allant justement de sa maitrise des arts martiaux à sa fascination pour la SF technologique et bien entendu les comics. BZZRKR (pour Bezerker) débarque alors presque comme un aboutissement, un cheminement dont il serait désormais le principal orchestrateur (il est à l’origine du pitch et a coécrit le scénario avec le doué Matt Kindt, grosse signature de l’univers Vailant) et le principal bénéficiaire. Entièrement portée sur ses épaules et son nom, la promotion du comics a ainsi réussi à engranger un chiffre record de prévente du titre sous forme de fascicules et d’album relié, et a immédiatement attiré le regard d’une industrie du cinéma, en l’occurrence Netflix, qui a acheté les droits pour produit une série animée et au moins un long métrage dont le rôle titre serait incarné par… Keanu Reeves. La boucle est déjà bouclée et finalement, peu importe réellement la qualité du comic. Sauf que Reeves et ses collaborateurs, y on mit tout de même beaucoup de soin et d’amour, à défaut d’originalité.
Les bons outils font les bons artisans
Le récit donc d’un être immortel arpentant la terre depuis l’aube de l’ère humaine et utilisé par les uns ou par les autres (à l’heure où commence le récit, par l’armée américaine) comme d’une arme meurtrière, sauvage et increvable. Une machine de mort implacable et barbare, sans plus une once de morale, dont le seul souhait serait de devenir enfin mortel. Entre une mission moderne et la recherche contemporaine de l’origine de son état et surtout de long flashback à l’ère préhistorique, les quatre chapitres réunis dans le premier album imposent des plus efficacement la mythologie du personnage, monstre tragique, touchant et effrayant, disposent quelques liens avec quelques ingrédients plus SF et renouent bien entendu avec le charactère ténébreux, taciturne et taiseux habituel de Keanu Reeves. D’ailleurs comme dans les John Wick le récit et le personnage se construisent essentiellement par le biais d’un gigantesque flot de séquences d’action stylées, mais ultra violentes, gore, voir épique lorsque B chevauche les champs de batailles de temps oubliés tel un héros des romans de Robert E. Howard. Accrocheur, spectaculaire, mega généreux, BRZRKR ne cache certainement pas ses contours de pur fantasme de fan-boy qui déploie constamment ses hommages et emprunts à ses lectures préférées allant des aventures de Conan à celle du Wolverine en passant par l’ultra violence d’un Geoff Darrow (Hard Boiled) et les planches saturées et déconstruites d’un Frank Miller (The Dark Knight Returns est plus que cité). Artiste mainstream ayant œuvré sur Silver Surfer, Daredevil, Wolverine : Weapon XouSkaar : Son of Hulk, Ron Garney affiche des planches qui n’ont jamais autant ressemblé au travail de John Romita Jr, en particulier lorsque celui-ci reprenait l’univers de Frank Miller pour les dernières itérations du Dark Knight justement.
Un concept qui ne manque pas d’accroches en effet, et qui ne se contente pas uniquement de surfer sur l’immense engouement des fans de la star, mais qui propose aussi un comic blockbuster ultra racé et bourrin, non sans une once de classe bien placée. A voir avec les deux tomes à venir si l’univers du BRZRKR a vraiment les épaules assez larges et solides pour porter toutes les ambitions de Keanu Reeves.