BOICHI SF SHORT STORIES T.1 : LES VOYAGEURS DE L’ESPACE TEMPS

BoichiオリジナルSF短編集 – Japon – 1996 / 2019
Genre : Science-Fiction
Dessinateur : Boichi
Scénariste : Boichi
Nombre de pages : 224 pages
Éditeur : Glénat
Date de sortie : 16 avril 2025
LE PITCH
Avec Les Voyageurs de l’espace-temps, le mangaka revient pour un recueil de huit nouvelles de science-fiction, traitant de sujets aussi variés que la dystopie, le voyage stellaire ou encore la rencontre avec d’autres créatures. Qu’il s’agisse d’un robot chargé de veiller sur les derniers éléments vivants à la suite d’une humanité condamnée, d’une mystérieuse opération ayant pour but de prolonger la vie – mais à quel prix ? – ou de la quête absolue d’un scientifique pour faire revivre une espèce malencontreusement disparue, toutes ces nouvelles se projettent dans l’avenir, mettant en avant la maestria d’un auteur hors norme.
Finfin du monde et autres histoires
Mangaka désormais bien installé grâce à ses séries Dr Stone, Origin ou le trippant Space Chef Caesar, mais aussi son spin-off imposant de One Piece, Boichi revient en petit format chez Glénat pour un diptyque offrant une sélection disparate, mais toujours très SF, de ses courtes histoires graphiques. Certaines sont bien connues des fans, d’autres moins, mais toutes ont de sérieux arguments.
Les fans invétérés de l’auteur, et qui l’adulaient déjà en 2011 lorsque Glénat publia l’anthologie Hôtel (en rupture de stock) vont forcément reconnaitre une grande part du contenu en présente, à commencer par la nouvelle du même nom. L’une de ses œuvres les plus célèbres et plébiscités qui imagine la destinée de Louis Armstrong, IA embarquée dans la gigantesque structure conçue pour habiter l’ADN de toutes les espèces vivantes de la terre… excepté l’humanité. Une pénitence pour la créature qui a finalement poussé la planète à sa dévastation. La terre entre dans une nouvelle ère, frappée constamment par la pollution, le réchauffement climatique et des vents dévastateurs alors que les millénaires passent, contés comme dans une fable apocalyptique par la tour elle-même qui ne cesse d’évoluer, de se réparer, se reconstruire et se ré-imaginer. Véritable fan de SF et passionné de science et de nouvelles technologies, Boichi s’appuie sur des données tout à fait véridique et probable pour étendre une réflexion sur l’avenir de notre planète à une échelle vertigineuse sur fond de renaissance d’une conscience automatisée. Un principe que l’on retrouve en version réduite, dans La tête dans le ciel, les pieds sur terre, où il est cette fois question d’une exploration impossible de la planète Venus où une poignée de scientifique survivants seront sauvés par un ersatz d’Origin qui passera de mini-moi à un véritable titan révolutionnant l’exploration spatiale par la force de ses bras. On n’est jamais très loin de la farce désespérée, et on retrouve ce ton (oup) poussé à l’extrême dans le délirant, et pourtant tout à fait documenté, Rien que pour les thons où les multiples tentatives d’un passionné pour faire réapparaitre sur Terre ces poissons totalement disparus à cause de la surpêche, entrainement une succession de bouleversements délirants et un évitement involontaire de la catastrophe écologique annoncée. Mélange d’humour grotesque, de grandes tirades sur la confection des sushi et d’exploration de concepts scientifique poussés, la quarantaine de pages va souvent très loin, mais avec beaucoup de talent.
Dans mes tendres archives
Dans ce recueil il est aussi question parfois de poésie et d’émotion sensible, comme lorsque Boicchi revoit et republie l’une de ses plus anciennes BD, La Légende de la nuit, petite conte charmant sur l’histoire d’une sorcière obligée de vendre toutes les étoiles du ciel, et un gentil marchant, amoureux, qui finira par repeupler la nuit pour ses beaux yeux. Le trait est encore bien fragile, mais la petite magie qui s’en dégage est bien plaisante. A côté, Présent, est forcément beaucoup plus dramatique avec sa jolie jeune femme réveillée d’un sommeil cryogénique mais condamnée à une mort sous trois jours, et que son mari et son fils tentent de rendre le plus doux possible. La science-fiction est bien présente dans le dispositif médical décrit dans les premières bulles, mais les quelques pages tiennent surtout pour ses élans d’amour et de générosité.
Enfin, outre deux très courtes blagounettes de deux pages chacune (le grille-pain provoquant des big bang à répétition ne manque pas de piquant), le tome contient aussi Diadem une pure démonstration graphique toute en couleurs, Une dizaine de pages bien barbares faites de combats épiques et de visions mythologiques futuristes un peu bordélique, mais où la virtuosité de l’artiste s’expose sans restriction. D’ailleurs l’une des qualités de cette édition reste l’opportunité de (re)découvrir ces nouvelles avec les pages couleurs de leurs premières publications (les superbes paysages d’Hôtel, le visage plein d’espoir de l’adolescente de Present…), mais aussi d’une longue postface de l’auteur dans laquelle il revient sur les origines et ses envies pour chacune d’entre-elles. Les fans de Boichi trouveront ici une belle pièce à apporter à leur collection.