BERLIN 61
Belgique – 2023
Genre : Thriller
Dessinateur : Baudouin Devill
Scénariste : Patrick Weber
Nombre de pages : 64 pages
Éditeur : Anspach
Date de sortie : 03 novembre 2023
LE PITCH
Après quelques jours de villégiature, Kathleen et Gérard, son compagnon, embarquent dans un train auto-couchettes en direction de Bruxelles. Elle y fait la connaissance de Annelore, une violoniste allemande. Les deux femmes sympathisent et conviennent de se retrouver lors du repas. Le soir, alors que Kathleen et Gérard ont rejoint le wagon-restaurant, le train s’arrête brusquement. Quelqu’un a déclenché le signal d’alarme. Kathleen a un pressentiment et part à la recherche de la musicienne. Elle est introuvable, et a laissé son précieux violon dans sa cabine.
La ligne claire du mur
C’est le retour d’une nouvelle grande héroïne de BD franco-belge, Kathleen tour à tour détective amatrice, hôtesse de l’air, journaliste et même adolescente curieuse, que ses créateurs embarquent désormais au-delà des frontières belges avec une enquête géopolitique qui prend cette fois-ci pour cadre le Berlin du mur de fer.
Premier album consacré à la demoiselle, Sourire 58 et son aventure prenant pour cadre l’Exposition universelle, fut aussi le premier titre du catalogue du jeune éditeur Anspach. Un projet entamé, comme tous les albums suivants, sous la forme d’une campagne de crowfunding. Depuis les amateurs de Belgique et de France ont pu découvrir Léopoldville 60, traitant de la fin des colonies belges, Bruxelles 43, opérant un flashback durant les années d’occupations (avec de jolies apparitions de grands de la BD) et Innovation 67 faisant écho à une authentique catastrophe ayant marquée l’histoire du pays. A chaque album, les auteurs s’efforcent ainsi de capturer leur époque et surtout d’assurer une illustration précise et documenté des vrais évènements historiques auxquels il est fait référence. Un regard en arrière sérieux mais qui ne se positionne pas comme une simple BD historique puisqu’elle s’attache aux nombreuses péripéties de la vie de Kathleen, rouquine décidément très curieuse, mais surtout courageuse, intelligente, apportant toujours son aide à ceux qu’elle croise.
Le Journal de Kathleen
Au-delà de son premier job d’Hôtesse de l’air, aussi pratique dramatiquement que crédible sociologiquement (c’était soit ça, soit secrétaire) qui rappelle inévitablement une certaine Natasha, la couleur de ses cheveux et son caractère bien affirmé la rapproche de nombreux héros de l’âge d’or de la bonne vieille BD, dont un certain Spirou en tête. On sent continuellement l’amour de l’ancienne école dans ces albums, entre les allusions à Michel Vaillant et les emprunts inévitables à Hergé et Edgar P. Jacob, mais sans jamais que l’univers propre n’en souffre. A ce titre, le travail de l’illustrateur Baudouin Deville (Rider on the Storm) tient tout autant de la madeleine de Proust, que d’une modernisation de codes auxquels plus grands mondes ne voulaient toucher. Même sensation du coté des histoires imaginées par Patrick Weber (Sang de sein) toujours assez classiques dans leur déroulé, mais parfaitement rythmées et avec un ton plus adulte, plus étoffé qui crédibilise l’ensemble. Dans ce 5ème tome donc, une simple rencontre avec une femme manifestement apeurée, amène donc Kathleen à s’embarquer pour l’Allemagne puis Berlin Est sur les traces de cette mystérieuse violoniste qui va la placer, en plein Berlin Est, aux cœurs d’enjeux qui la dépasse : tensions entre les deux blocs, agents doubles dans tous les coins, services secrets qui se jouent d’elle, transferts illicites d’antiquités… Sans compter sur l’opération « Roméo » (qui a véritablement existé) et ses agents de la Stasi séduisant les femmes de l’ouest.
Le changement de paysage géographique ne fait certainement pas de mal à la série et lui donne même un coté thriller politique, voir James Bond des premiers temps, qui ne manque pas de charmes et d’efficacité.
A noter que comme pour les albums précédents, l’édition propose en fin d’album un cahier d’une dizaine de pages de dossiers historiques permettant d’approfondir le décor et les questions soulevées par l’album.