BATMAN CHRONICLES 1988 VOL.2
Detective Comics #582-589 + Detective Comics Annual #1 + Green Arrow Annual #1 + The Question Annual #1 – États-Unis, France – 1988
Genre : Super-héros
Dessinateur : Norm Breyfogle, Klaus Janson, Tom Artis, Denys Cowan
Scénariste : John Wagner, Alan Grant, Dennis O’Neil
Nombre de pages : 244 pages
Éditeur : Urban Comics
Date de sortie : 26 mai 2023
LE PITCH
L’année 1988 voit le deuxième magazine consacré au Chevalier Noir, Detective Comics, prendre un tournant résolument plus sombre, sous l’impulsion du duo créatif composé de John WAGNER et Alan GRANT au scénario, et du trait expressionniste de Norm BREYFOGLE au dessin. Loin du ton coloré et humoristique des épisodes précédents, l’onde de choc qu’a été BATMAN – ANNÉE UN de Frank MILLER se propage un peu plus alors que Batman est confronté à une cohorte de super-criminels plus sombres et plus réalistes ainsi qu’aux problèmes sociétaux qui gangrènent la cité de Gotham.
Dans les ombres de Gotham
Second volume Chronicles consacré à la production Batman de l’année 1988, celui-ci regroupe essentiellement les épisodes de la revue Detective Comics. Un titre historique mais souvent caché par l’évènementiel Batman tout court, qui retrouve ici un regain d’énergie grâce à l’arrivée de deux britishs échappés de la revue 2000 A.D. : Alan Grant et John Wagner.
Un duo d’auteur qui certes s’était déjà fait la main sur une maxi-série Outcast chez DC comics, mais qui surtout avait largement fait ses preuves sur l’une des icônes de la BD anglaises : Judge Dredd. Si le personnage est devenu aussi populaire, c’est certainement grâce à eux et à quelques récits aussi épiques et brutaux qu’irrévérencieux. Rédacteur en chef du pôle Batman (entre autres) Dennis O’Neil ne se trompe pas lorsqu’il les engage pour reprendre en main Detective Comics, délaissée depuis le départ de Mike W. Barr et Aland Davis, et surtout en nette perte de vitesse là où le titre Batman, bardé d’évènements éditoriaux comme Year One, The Killing Joke et Death in Family, est rapidement devenu un incontournable pour les lecteurs. Et plutôt que de s’empêtrer à aller titiller la série principale, à la concurrencer ou à vouloir s’y rattacher, le Detective Comics de Grant et Wagner s’en détache immédiatement ne faisant que peu de cas d’une chronologie à suivre, voir même se débarrassant presque totalement de l’aspect « humain » de Batman. Il n’y sera jamais fait mention de Robin, une ou deux fois d’un Bruce Wayne dont on ne verra pas le visage : Batman reste Batman dans une succession de virées nocturnes, souvent trempées par une pluie inlassable où le soleil ne darde que bien difficilement ses rayons. Un oiseau de nuit, un vigilante solitaire qui ère à nouveau dans des rues habitées de criminels violents et de monstres sadiques, ces épisodes semblent presque revenir au justicier des origines, protecteur incorruptible, n’hésitant plus lui non plus à embrasser la violence de son monde.
Un homme dans la ville
Accompagnés par les planches baroques et ténébreuses de Norm Breyfogle, les scénaristes dépeignent ainsi une Gotham plus dangereuse que jamais, habitée par une population désœuvrée, souvent droguée, vivant dans la rue ou dans les quartiers pauvres, comme une conséquence d’une société aussi décadente que le pendant anglais de Mega-City One de Dredd. Et dans ces décors, pas question de faire revenir l’habituel galerie de vilains, Detective Comics devenant le théâtre privilégié d’une nouvelle génération de dégénérés plus sanglants et malades que jamais : le ventriloque et sa poupée en bois à l’effigie d’Al Capone, Ratcatcher et son armée de rats terrés dans les égouts, le criminel Kadaver fasciné par la mort et le gothique ou l’homme corrosif dégoulinant de produits chimiques. Sacré défilé pour une poignée d’épisodes qui ne visent jamais la grande saga où l’ambition d’une Graphic Novel, mais qui explorent non sans un certain sadisme l’ultime bataille d’un Batman face à une citée au bord de l’anarchie.
Méconnus mais indispensables pour les fans du personnage, ces épisodes sont accompagnés dans le présent volume par les premiers Annual de Detective Comics, Green Arrow et The Question qui formèrent cette année là la trilogie Fables. Rédacteur en chef des trois séries, Dennis O’Neil s’y offrit un joli retour à l’écriture en explorant le monde de ces trois héros urbains qui vont être rassemblés par un étrange bonze et sa garde du corps, Shiva, afin de l’aider à reposer en paix auprès de son épouse. Un ton plus mélancolique pour le coup, et sans doute aussi plus zen, où O-Sensei s’assure l’aide de ces trois héros, alors empêtrés dans leurs névroses presque coutumières, en leur apportant quelques vérités philosophiques qui vont leur permettre de libérer. Récit curieux mais efficacement menée qui permet en outre de profiter d’une prestation éclatante de Klaus Janson (ancré par Tony DeZunica) sur les pages Detective Comics.
A noter que comme pour les volumes précédents de la collection, les différents épisodes sont agréments des couvertures originales, d’extraits du courrier des lecteurs et surtout de textes explicatifs très informés signés Robert Greenberger, ancien éditeur de DC Comics.