BATMAN / CATWOMAN
Batman Catwoman #1-12 + Special + Annual #2 + Detective Comics #1027 + 80th Anniversary – Etats-Unis – 2016, 2020/2022
Genre : Super-héros
Scénariste : Tom King
Illustrateur : Liam Sharp, John Paul Leon, Clay Mann
Éditeur : Urban Comics
Pages : 448 pages
Date de Sortie : 25 novembre 2022
LE PITCH
Batman et Catwoman se sont rencontrés, sont tombés amoureux et ont eu une vie heureuse. À la mort de Batman, Catwoman règle les derniers comptes d’une vie passée à évoluer entre les ombres. Son compagnon disparu, elle a désormais toute latitude pour rendre visite, une dernière fois, à une vieille connaissance à l’humour douteux…
Elle et lui
Si les amateurs ont déjà vu Bruce Wayne folâtrer avec de nombreuses figures féminines, aucune n’est aussi remarquable, et finalement profondément logique, que Selina Kyle, alias Catwoman. Un couple mythique auquel Tom King entendait bien offrir un final flamboyant.
Comme il l’avait déjà largement exprimé sur son run Batman Rebirth, Tom King (Superman Up in the Sky, Omega Men, Mister Miracle…) assume une profonde fascination pour le personnage volatile de Catwoman, cambrioleuse, ex-super vilaine (mais ça dépend des fois) et surtout love interest régulière de Bruce Wayne. Les auteurs, artistes, mais aussi un certain Tim Burton, n’ont cessé de les rapprocher pour mieux les éloigner comme si leurs natures opposées, leurs blessures personnelles et la dureté de la vie à Gotham City ne pouvaient justement les rapprocher. C’est donc le pari qu’à fait Tom King : leur offrir dans un futur possible ou alternatif, une vie commune, un mariage réussi, des soirées entre collègue en collants et même une fille, devenue Batwoman quelques années plus tard. Bruce Wayne meurt, Selina Kyle se retrouve seule avec ses anciens démons et décide que sa promesse ne tient plus, se permettant enfin d’assassiner le Joker. Voilà le point de départ de cette maxi-série Batman Catwoman qui étudie autant la vie d’après pour madame Wayne, poursuivie par la police et sa fille justicière, retrouvant d’anciens collègues ou ennemis, que les nombreux souvenirs que les évènements font resurgir. Retour alors bien des années plus tôt au début de leur relation alors que tout deux devaient faire face au retour du Faucheur (ou Fantôme masqué), incarné alors par Andrea Beaumont, bien décidée à massacrer tous les acolytes du Joker… Mais aussi encore plus loin lorsque Catwoman cultivait une relation étrange et ambiguë avec ce dernier. Tom King n’est pas un auteur qui fait les choses simplement, et il prend plaisir ici à constamment superposer les époques, les temporalités, toujours pour démontrer cette évidence romantique qui ne peut que dépasser leur relation souvent conflictuelle, entre séduction, petites trahisons et besoin finalement de s’aligner sur les valeurs de l’autre.
Comme des animaux en cage
Le problème ici est que cette multiplication de trame ne se révèlera au final jamais vraiment convaincante ni passionnante, mélangeant allégrement The Killing Joke, Dark Knight Returns ou les dessins années Le Fantôme masqué et Batman Beyond, mais sans finalement y trouver une logique profonde. Un sentiment d’esbroufe, de remplissage, de surabondance sans assez de maitrise tout à fait accentué par le fossé stylistique qui existe entre les deux artistes, au demeurant excellent chacun dans leurs domaines, engagés ici. Ainsi Clay Mann (X-Men Legacy, Action Comics, Gambit…) impose une approche iconique, jamais très loin de l’école Jim Lee, qui assez aisément relie ses superbes planches à une tradition plus classique des publications Batman. Intervenant sur seulement trois chapitres, mais centraux, Liam Sharp (Testament, Spawn The Dark Age) est bien plus connu pour un travail plus baroque, voir cauchemardesque, qui viendrait plutôt titiller les pages du Arkham Asylum de Dave McKeen. Les deux approches visuelles ne communiquent pas comme si là aussi les différentes orientations de la série peinant à se marier au bout du compte. Pourtant Batman Catwoman, réussit régulièrement à émouvoir et à retrouver la force des deux personnages et de leur couple hors-normes. Des petits moments volés dans une ruelle, une nuit torride, des sentiments avoués, les derniers jours pleins de tendresse, où finalement leur humanité toute simple a enfin le temps de s’exprimer.
C’était pourtant la grande qualité du très court récit « à la vie à la mort », déjà publié en album par Urban Comics et qu’on retrouve ici comme introduction, évocation parfaite de ce jeu du chat et la souris qui les aura occupés toute leur vie et ce jusqu’à la fin. Un petit bijou d’une vingtaine de pages d’une grande justesse et d’une admirable simplicité qui dépasse ici aisément les quatre centaines qui tentent vainement de l’approfondir.