BATMAN : THE KNIGHT
Batman: The Knight #1-10 – Etats-Unis – 2022
Genre : Super-héros
Scénariste : Chip Zdarsky
Illustrateur : Carmine Di Giandomenico
Editeur : Urban
Pages : 312 pages
Date de Sortie : 24/02/2023
LE PITCH
Est-ce de la tristesse ou de la colère ? Ou les deux mêlés l’un dans l’autre, à travers les méandres de la psyché complexe de son nouveau patient ? Le Docteur Hugo Strange cherche les réponses à ces questions, en essayant de comprendre les mécanismes de défense psychologiques que l’adolescent a pu construire pour se protéger d’un événement traumatique de son enfance. Mais ce nouveau patient n’est pas exactement comme les autres… Ce nouveau patient est le jeune homme le plus riche de la ville, un certain Bruce Wayne !
Before the cape
Rarement explorés, ou en tout cas approfondis, les années d’entrainement du jeune Bruce Wayne, son passage d’un orphelin dévasté au futur héros de Gotham, sont au centre de la maxi-série Batman The Knight. Un voyage initiatique servi avec poigne par Chip Zdarsky & Carmine Di Giandomenico.
Entre l’image d’un pauvre gamin hurlant de douleur devant le corps de ses parents assassinés dans une sombre ruelle et les évènements décrits dans l’incontournable Year One de Frank Miller, il s’est naturellement écoulé de nombreuses années. Des années d’errance loin de Gotham, de vagabondages, de mise en danger mais aussi d’un âpre entrainement tout autour du monde, dont on a souvent pu découvrir les détails par bribes de flashbacks, par quelques dialogues ou allusions et sans doute de manière un peu plus prolongée avec le bien nommé Batman L’An zéro de Snyder et Capullo. Mais avec The Knight, le scénariste de Batman Dark City, mais aussi de passages remarqués sur Spider-Man et Daredevil pour la maison d’en face, Chip Zdarsky explore comment la force de volonté et l’abnégation du jeune Bruce va le lancer sur les traces de maitres des arts martiaux, de spécialistes de la cambriole (une séduisante française qui rappelle une future féline…) , de tireurs d’élite, d’espions insaisissables, d’instruits à l’ésotérisme, de cerveaux analytiques voir même d’une célèbre ligue d’assassins pour apprendre et s’approprier leurs techniques. Le vigilante aux lisières du surhomme se façonne de page en page et s’entoure dès lors pour le lecteur d’une logique héroique inédite, plus construite et relativement crédible.
Une arme à aiguiser
Car si les chapitres font croiser quelques figures plus ou moins connues comme Hugo Strange qui lui sert un temps de psy, la belle Zatanna et son père ou l’organisation naissante du terrible Ra’s al Ghul, il montre surtout les évolutions subies et voulues par Bruce, travaillant son corps dans la douleur, mais questionnant aussi sans cesse la pertinence de sa mission, sa capacité à la mener à bout et son débat intérieur entre justice et vengeance. Sans doute pour se faciliter la tache et créer un dialogue plus efficace et clair, le scénariste replace aussi en chemin un certain Anton (dont les lecteurs des 80’s se souviennent peut-être), apprenti comme lui et qui va devenir autant son confident, son compagnon d’arme, que son sombre reflet, cette fameuse voie autodestructrice et meurtrière qui l’attend à chaque faux pas. Une belle proposition qui vient encore étoffer l’univers du défenseur de Gotham et délivre même au passage, malgré la distance et les tensions de la jeunesse, quelqu’une des plus belles séquences dédiées à la relation père-fils entre Bruce et Alfred Pennyworth. Plutôt porté sur les atmosphères sombres et venant constamment creuser la violence sous-jacente du personnage central, Carmine Di Giandomenico (Magneto Le Testament, Romano), teinte finalement la route du futur Batman d’environnements sombres et brutaux où pointent constamment l’esthétique et les ombres de Gotham.
Une approche relativement prenante et inédite dans le fond, mais qui montre tout de même quelques limites dans la durée avec sa construction mécanique autour d’une figure tutélaire par épisode et le classicisme de certaines rencontres (tout le passage avec Ra’s déjà lu mille fois et en mieux). On note aussi une une relation finalement assez prévisible avec le camarade Anton qui semble surtout permettre parfois de préparer le futur retour dans la série ongoing d’un ancien ennemi désormais intimement lié au passé de Batman. Mais cela n’empêche certainement pas la lecture d’être prenante, d’apporter de belles émotions au personnage et de revenir sur des contours plus humains du vrai Bruce Wayne, avant qu’il ne se cache définitivement derrière le masque.