BATMAN – GOTHAM BY GASLIGHT 1893 T.1 : L’HÉRITAGE KRYPTONIEN

Gotham By Gaslight : The Kryptonian Age #1-6 – Etats-Unis – 2024/2025
Genre : Super-héros
Dessinateur : Leandro Fernandez
Scénariste : Andy Diggle
Nombre de pages : 216 pages
Éditeur : Urban Comics
Date de sortie : 11 avril 2025
LE PITCH
1860. Un mystérieux météore s’écrase sur les plaines du Midwest américain, déclenchant une chaîne d’événements qui se répercuteront dans les décennies à venir… Trente ans plus tard, en plein cœur de la révolution industrielle, Batman va devoir faire face à l’émergence de super êtres qui dépassent tout ce que le XIXe siècle a connu jusqu’alors, renversant l’équilibre des pouvoirs de cette version unique de l’univers DC.
Le temps des justiciers
DC comics s’offre un retour remarqué dans le petit monde victorien de Gotham by Gaslight, dans lequel Brian Augustyn et Mike Mignola imaginait la rencontre entre un Batman speampunk et un certain Jack L’éventreur. Ce sont aujourd’hui Andy Diggle et Leandro Fernandez qui reprennent le flambeau avec une première mini-série, L’Heritage Kryptonien, qui en élargie considérablement les frontières.
Publié pour la première fois en 1989 (oui, il y a presque quarante ans), Gotham by Gaslight avait à la fois marqué un rapprochement on ne peut plus logique entre les aventures de chers Batman et le gothique victorien (auxquels Bob Kane et les suiveurs avaient bien entendu beaucoup empruntés) et la première pierre de la branche Elseworld. Un label qui permit par la suite à de nombreux auteurs et créateurs de remanier l’univers et les personnages DC à leur façon, sous la forme de projections dans le passé ou le futur, ou de What if ? questionnant la nature profonde de ceux-ci. Il y a forcément quelque chose de l’hommage à revenir à Gotham by Gaslight tant d’années après, et pourtant Andy Diggle (The Losers, Thief of Thieves, Hellblazer…) n’a pas simplement signé pour offrir une nouvelle aventure à ce Batman là, mais bien pour explorer tout le potentiel de la proposition initiale. Le Bruce Wayne en présence est toujours le même, accompagné d’une Selina Kyle ou d’une Thalia al ghul, mais il s’extrait définitivement des ruelles étriquées et de l’atmosphère pulp urbaine pour se tourner vers des genres bien plus vastes et variés : aventure, récit de civilisations perdues, western, spiritualisme, mystique lovecraftienne…
Autres temps, Autres mœurs
Le tout pour permettre à d’autres légendes de s’y imbriquer naturellement. Comme le titre l’indique, la cible privilégiée reste ici l’attente de l’apparition d’un autre Superman, mais il n’est certainement pas le seul nom connu puisque dans un grand jeu de chasse au trésor collectif sur fond de menace planétaire venue du fond des temps, 1893 fait revivre progressivement une bonne part du panthéon de l’éditeur. On y découvre ainsi, entre autres, Diana, dernière survivante d’amazones cachées dans les tréfonds de la terre, un bonimenteur au nom d’Alan Scott qui vend les excursions à bord de sa montgolfière la Green Lantern, un alien métamorphe venu de mars, un pauvre garçon transformé en homme mécanique par un Lex Luthor plus ambitieux que jamais et un shérif de Smallville qui semble éviter les balles avec une chance indécente. Si le rôle de John Constantine est prépondérant dans l’avancée de la trame, il est bel et bien question ici d’une recréer la dynamique de la fameuse Justice League. Une idée pas nouvelle mais habilement menée, réussissant à jouer avec les grandes lignes de ces héros rabattus, à les malmener, les modifier, les intégrer dans la mythologie même de ce cadre Elseworlds mais sans jamais perdre de vue leur nature profonde et l’équilibre qui existe entre eux.
Un exercice particulièrement bien mené ici mais qui effectivement prend son temps pour se mettre en place et tisser une trame qui s’achève sur un cliffhanger de taille donnant à cet album des airs de relaunch, d’introduction à une nouvelle gamme de mini-séries à venir. Pour ces dernières d’ailleurs, l’éditeur serait bien inspiré de reprendre Leandro Fernandez (The Punisher avec Garth Ennis, Northlanders, Stormwatch P.H.D.) digne descendant de Mike Mignola qui, avec un petit quelque chose de Tim Sale, joue sur une même note pulp, parfois aux lisières de l’épouvante ou de l’aventure exotique, mais y apporte aussi des notes bien plus lumineuses, presque naïves, qui bien entendu annoncent l’apparition tant attendue, et finalement centrale, du kryptonien.