ABADDON T.1 : SI-NAÏ
France – 2023
Genre : Science-Fiction
Dessinateur : Robert Carey
Scénariste : Christophe Bec
Nombre de pages : 64 pages
Éditeur : Soleil Editions
Date de sortie : 19 avril 2023
LE PITCH
2027. Partout dans le monde, des objets mythiques des 5 grandes religions sont découverts. Les pouvoirs de ces artefacts sèment la mort et la panique et les hautes instances religieuses semblent cacher un secret qui pourrait anéantir l’Humanité. Trois générations plus tard. Alors que la société s’est réorganisée, des migrants font route vers Si-Naï, où ils espèrent trouver un dernier refuge.
L’Ange exterminateur
Alors que le 5eme tome de Crusaders vient achever son space opera, Christophe Bec publie en parallèle chez Delcourt le premier tome d’une trilogie à venir : Abaddon. Une nouvelle forme d’apocalypse annoncée entre futur ravagé et présent habité par l’éveil de forces mystiques. Un nouveau récit ambitieux et complexe… mais peut-être un peu trop.
Auteur talentueux et prolifique, Christophe Bec peut aussi parfois se faire rattraper par ses propres automatismes. C’est un peu le cas ici avec une construction dramatique entre deux époques (avant l’apocalypse et longtemps après), une catastrophe planétaire suivie aux quatre points cardinaux et un mystère entre évocations sociopolitiques actuelles, références mystiques et spectaculaire hollywoodien. L’auteur est clairement dans ses clous alternant savamment les époques, plaçant tranquillement les pistes d’un suspens dont on ne découvrira forcément le fin mot qu’à la fin du troisième album, mais n’arrive pas à surprendre les habitués. Quelques mois à peine après le précédent Aurora et sa génération mutante spontanée, Abaddon se présente comme une œuvre voisine où la menace ne viendrait plus d’une jeune génération aux pouvoirs incommensurables mais d’anciennes reliques perdues qui annonceraient le retour d’une force de destruction oubliée. Une apocalypse théologique, ça change un peu du réchauffement climatique, de la guerre et du nucléaire. L’Arche de l’alliance, le sceau de Salomon, le trident de Shiva, l’épée Zulfikar de Mahomet et le miroir de Yata, des artefacts de jugement et de vengeance dont les réapparitions, plus ou moins hasardeuses, mettent rapidement les différentes communautés religieuses en émois et pas forcément dans l’allégresse que l’on aurait pu imaginer.
La montagne ça vous gagne
Tout ce premier album avance ainsi par inserts, suivant d’un coté la lente avancée d’un groupe de survivants à travers un désert digne de Mad Max sur les traces d’un lieu mythique, Si-Naï, et de l’autre des épisodes plus ou moins creusés auteur des personnages connectées à ces objets mythiques aux émanations parfois meurtrières. La trame impose de pages en pages ses nombreuses informations, avance laborieusement, mais manque étonnement de tension ou d’un point de vue plus sobre et humain pour véritablement offrir une intensité à la lecture constamment en trop plein. Idem, le lien entre les deux grandes époques n’étant pour l’instant pas du tout défloré, le lecteur passe de l’un à l’autre sans grand implication. Intéressant certes, mais toujours à distance dans sa narration, Abaddon montre aussi un illustrateur, l’Irlande Robert Carey (Aliens Resistance), qui tombe un peu trop aisément dans la facilité d’environnements photographiques pour les phases contemporaines, un peu rigides et lourdes, là où les explorations post-apocalyptiques ou les quelques jaillissements purement SF / fantastique se montrent beaucoup plus convaincants. Peut-être que les révélations attendues dans les deux tomes à venir et que les connexions qui naitront entre les différents points de vue permettront de redécouvrir à terme cet imposant démarrage, mais pour l’instant Si-Naï se gravit assez difficilement.