Fleuron de la fameuse Ozploitation et thriller fantastique récompensé dans de multiples festivals (dont Avoriaz), Long Weekend est d'une certaine façon le film d'agression animale ultime. Celui où lassée de subir la bêtise humaine la nature reprend ses droits et devient le croquemitaine définitif, terminal.
Longtemps oublié, boudé, dans son pays d'origine avant d'être redécouvert au début des années 2000 (avec entre autre un remake signé Jamie Blank), Long Weekend est le rejeton naturel de deux courants surgissant dans les années 70. L'Ozploitation tout d'abord, soit une résurrection économique du cinéma de genre australien qui donna naissance à un déchaînement de séries B aussi spectaculaires qu'uniques. Un certain éveil écologique sur grand écran ensuite, donnant autant d'œuvres de science-fiction désespérées (Silent Running) qu'une succession d'invasions et de revanches animales en tous genres. Dans le prolongement de l'implacable Les Dents de la mer, mais aussi de productions plus ouvertement « exploitation » (Slugs et ses limaces, Grizzly et son ours, L'Horrible Invasion et ses tarentules, Frogs et ses grenouilles...), le scénariste Everett De Roche (Patrick, Harlequin, Déviation mortelle, Razorback...) pousse la logique plus loin et imagine une nature qui développerait son propre système immunitaire et rendrait la monnaie de sa pièce à ceux qui ne la respecterait pas assez (si seulement). En l'occurrence dans Long Weekend, un couple de la middle class australienne, parfaitement installé dans leur banlieue de Melbourne, entre frigo dernier cris et poulet cellophané, dont monsieur s'imagine pouvoir devenir le roi du camping et du tir au canard le temps d'un week-end à la mer.
Du camping d'arriviste, équipement coûteux et noyé sous les gadgets et la toile orange. Du tourisme égocentrique où les doux époux vont laisser exploser leurs frustrations, colères et incapacités à se retrouver. Ne respectant ni l'autre, ni leur environnement, ils provoquent un rejet immédiat chez le spectateur, les trouvant difficilement sympathiques dans leurs invectives, autant que dans leur absence de considération pour le superbe paysage sauvage - célébré dans un scope anamorphosé somptueux - véritable théâtre de leurs bassesses. Un kangourou percuté sur la route en pleine nuit (accident qui trouvera un écho méchamment ironique), un mégot fumant jeté sur le bas coté, un crabe écrasé sur la plage, un œuf d'aigle piqué dans le nid puis éclaté sur un arbre.... Tout est stupide, gratuit et d'une barbarie sordidement ordinaire comme lorsque Briony Behets (Night of Fear) vide une bouteille d'insecticide sur de malheureuses fourmis venues grappiller les restes. A contrario du remake de 2008 pas une once d'humour ou de décalage ici, le réalisateur Colin Eggleston manie habilement une froide cruauté, réussissant en s'accrochant au drame conjugal, à faire monter graduellement une tension terriblement palpable, du naturalisme anthropologique au cauchemar darwinesque. Un fantastique économe où les bruitages sauvages, les attaques de volatiles ou l'avancée constante d'un cadavre de dugong abattu sur la plage, relèvent plus de l'étrangeté d'un épisode de La Quatrième dimension qu'une grosse bisserie démonstrative. Alors que la virilité et la fierté de John Hargreaves (Les Cascadeurs de la mort) se fait la mal, le film vrille au cauchemar surréaliste où un adorable opossum devient une menace mortelle, chaque bosquet est un labyrinthe inextricable. Un Huis clos en pleine nature terriblement tenace et peut-être encore plus savoureux aujourd'hui.


