Après le carton planétaire du premier Le Flic de Beverly Hills, Eddie Murphy aurait pu choisir n'importe quel projet, servi sur un plateau d'argent par une Paramount reconnaissante. Il a choisi Golden Child, et le mystère reste entier.
Énorme star révélé par le Saturday Night Live et monstre du stand-up, Eddie Murphy est encore monté d'un cran avec Le Flic de Beverly Hills, comédie policière entièrement dévouée à son irrévérence new-yorkaise et sa décontraction contrastant avec un bagou des plus acéré. Partageant l'affiche jusque-là avec Nick Nolte dans 48H et Dan Aykroyd dans Un Fauteuil pour deux, il devient immédiatement bankable, marque nouvelle d'un héros joueur, séducteur, casse-cou mais loin des super-héros bodybuildés, comme viendra le concrétiser deux ans plus tard le mythique Piège de cristal. Une approche à la cool, dans l'air du temps que l'on retrouve assez logiquement pour le générique d'ouverture sur fond de pop-électro-rock, de drapeaux américains, de belles caisses et de néons fluo... Singeant directement l'arrivée d'un certain Axel Foley dans la belle ville de Beverly Hills. Un peu moins bavard que dans ce dernier, l'acteur s'en paye tout de même une belle tranche de petites vannes bien placées sous la ceinture, de sourires complices avec le spectateur et surtout quelques moments bien grotesques comme si, détaché de la réalité du film, il n'espérait qu'une seule chose : en sortir ! Pas toujours bien à l'aise à l'écran, Eddie Murphy qui ne fut pas tendre avec le film qu'il qualifiait de « piece of shit », fait effectivement office ici d'intru, télescopé « chosen one » dans une aventure qui ne lui ressemble pas.
Acteur justement très ancré dans l'image d'une certaine comédie urbaine, il apporte, un peu de force, un important décalage dans un projet qui se voulait au départ une sorte de polar de Raymond Chandler baigné dans le surnaturel, ici asiatique. De petit airs de film noir, de thriller aux limites horrifiques dont on perçoit encore des restes dans un squatt où eu lieu un sacrifice sataniste (le fameux sang qui remonte dans un bol de riz), quelques créatures étranges et monstrueuses, une photographie qui ne se montre jamais aussi appréciable que dans les ruelles mal éclairées et même des touches d'érotisme (Charlotte Lewis ses yeux de biche, sa chemise mouillée et sa petite culotte) désormais un poil déplacées. Sous l'impulsion de Murphy et de la Paramount, l'objet tourne à l'ersatz chaotique d'Indiana Jones, à l'aventure comic-book aux multiples ruptures de ton venant se frotter par son orientalisme au Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin sorti la même année et partageant même une grand part de son casting asiatique. Coup dur sans doute pour le réalisateur Michael Ritchie qui semble vouloir constamment rappeler l'excellence de son Prime Cut ou l'étrange cruauté de son L'île sanglante, mais qui par les insistances de sa star, le tournage intégralement en studio (et ça se voit) et des effets spéciaux souvent assez naïfs (le danseur canette en stop-motion, le démon ailé mal collé sur la pellicule) se rapproche ici plus certainement de ses bonnes grosses comédies Femme de choc ou Fletch aux trousses. Totalement schyzo donc le Golden Child, pur rejeton des 80's qui ne sait jamais sur quel pied danser. Mais il se révèle pourtant constamment divertissant car nourri de la frénésie et de la liberté (ici involontaire) du cinéma pop-corn de ces années là.


