Après un premier détour remarquable du coté du Bluray avec les films de Pete Walker, Artus Films enfonce définitivement le clou et rejoint les meilleurs éditeurs bisseux du marché en proposant son premier coffret Bluray / DVD / Livre d'une collection cauchemardesque dédiée à l'extraordinaire Lucio Fulci.
Dire que Lucio Fulci a marqué à vie la quasi-intégralité des amateurs de gore via L'Enfer des Zombies est un doux euphémisme. Rien ne laissait pourtant espérer un tel résultat à l'époque. Vendu avant même la première ligne de scénario achevé, Zombi 2 (sans le «e», pour éviter les embêtements juridiques, «2» pour prétendre faire suite à Zombie) se tournera à l'italienne, sans le sou et dans une désorganisation assez phénoménale. Moins d'un mois séparera le dernier jour de prises de vue de la sortie européenne, à peine le temps nécessaire aujourd'hui pour mixer les doublages internationaux d'un blockbuster américain. Ca laisse rêveur.
Malmené dans sa vie personnelle, Fulci, jusqu'alors auteur gothique solide (cf. L'Emmurée vivante), déversera son mal-être et ses frustrations dans L'Enfer des Zombies (ou Zombie Flesh Eaters en Angleterre, faut suivre). Sanglant à n'en plus pouvoir, le film ne prétend pas jongler avec les thématiques politiques de son homologue américain. Fulci et son producteur Fabrizio de Angelis veulent un film d'horreur direct, au premier degré, un survival dont l'inspiration vaudou nourrira avant tout un cauchemar quasi-expérimental.
Quoiqu'il en soit, le pari sera tenu haut la main par l'équipe de Fulci. Si ses figures imposées affichent aujourd'hui un kitsch plus ou moins savoureux (les scènes de nu n'ont vraiment, mais alors vraiment rien à faire là), L'Enfer des Zombies reste un sommet d'impressionnisme macabre, de raffinement dans l'horrible. Desséchés, parcourus dans leurs chairs par des vers et autres bestioles peu recommandables, les morts-vivants errent désincarnés dans des rues de western filmées en Cinémascope, et dégageant une aura singulière, qui n'appelle jamais le rire. Dans ce no man's land exotique où viennent se perdre des occidentaux trop curieux, Fulci met en scène des morceaux de bravoure surréalistes, tellement graphiques et excentriques qu'ils dépassent d'emblée tout procès moral : une femme énuclée en gros plan par un revenant, un mort dévorant un requin vivant, une tête s'extirpant lentement d'une terre aride... Un spectacle ahurissant qui trouvera son apogée lors d'un gunfight western à la limite de l'abstraction, où lors de cette image finale emblématique, montrant les morts arpenter mécaniquement le pont de Brooklyn. Un plan de légende pour un film mémorable.


