Plus rien ne va dans les rues de Milan... et ce n'est pas mieux à Rome où cette crapule de Tomas Milian (Colorado) et l'extradé John Saxon (Les Griffes de la nuit, Opération Dragon) s'apprêtent à s'allier pour devenir les maitres du crime. Heureusement un héros des temps moderne veille : Maurizio Merli (Mannaja). Attention ça va castagner à tour de bras.
Retour à cette époque bénie (?) où les polars européens, particulièrement italiens, régnaient sur le box office à grand coup de héros virils, expéditifs et d'arrière-plan politique parano en forme de brulots, souvent peu subtiles. Des productions tournées à la pelle, avec des stars la plupart tout juste sorties du western spaghettis qui s'en donnent à cœur joie, dans un pays qui connaissaient ce que l'on appellerait plus tard les «années de plomb» : gouvernement réactionnaire, terrorisme d'extrême gauche, exactions d'extrême-droite, montée de la violence dans la rue, corruption galopantes... Une bombe à retardement. Devant un pays au bord de la déroute, les spectateurs se jettent dans les salles pour savourer justement des films d'actions proposant une solution toute simple : butez-moi tout ça ! Réalisateur qui signera un peu plus tard parmi les essais les plus navrants de l'ère du gore rital (aaah L'Avion de l'apocalypse), Umberto Lenzi est sans aucun doute l'un des metteurs en scène les plus productifs du poliziesco, mais aussi l'un des plus réjouissants. Un véritable âge d'or pour lui, où son style un peu rustre, sec et brut de décoffrage s'inscrit parfaitement dans un environnement où les personnages se balancent des bons mots couillus dès qu'ils ouvrent la bouche... Autant tout du moins que les coups de lattes dans les parties et les bastos dans le genou. Suite plus ou moins avouée du précédent Brigade spéciale (Merli garde le même rôle détective Tanzi alors que Milian change de vilain pour devenir... le chinois !), Le Cynique, l'infâme, le violent est à ce titre une véritable exacerbation de tout ce que l'on peut attendre du genre.
Entre les gonzesses qui se prennent des baffes ou se jettent au cou de leur sauveur, les truands sadiques, la police totalement dépassée et ce sacré moustachu au lever de jambe un peu rigide qu'est Maurizio Merli totalement déchainé, l'opus s'avère un véritable régal. Authentique star de ce cinéma là, presque totalement oublié aujourd'hui, Merli et ses bon petits élans de facho de service, se livre ici à un best of de ses meilleurs vannes, sourires en coin, et exécutions sommaires bien entendu. Ça se savate à tout va, ça dragouille la jolie Gabriella Lapori (avec des seins à l'air totalement gratuits) et se moque ouvertement du défilé de salles trognes qui passent. Charles Bronson du pauvre, Merli se fait tout fois souvent voler la vedette par un John Saxon impayable en mafieux totalement sadique et tortionnaire et bien entendu le toujours parfait Tomas Milian, gangster nihiliste dont on peine aujourd'hui encore à comprendre le surnom de chinois.
Anecdote connue, Merli et Milian dont la haine réciproque les avaient amené à en venir aux mains lors du tournage de Brigade Spéciale, refusèrent de se croiser sur le tournage de celui-ci, le réalisateur en étant quitte pour triturer son montage bien cut lors de l'affrontement final ! D'ailleurs, si Lenzi n'a jamais été un très grand réalisateur, il s'avère ici un artisan particulièrement efficace, maitrisant avec roublardise le rythme de ses meilleures scènes d'actions (baston, poursuites sur le toit d'un centre commercial, scène de casse inutile mais marrante....) et réussit à rebondir avec une certaine subtilité (what ?) sur l'aspect leonien de son titre. Dans Le Cynique, l'infâme, le violent on trouvera ainsi un bon soupçon de Pour une poignée de dollars grâce à un scénario plus développé et construit qu'à l'accoutumée, baignant finalement les anciennes légendes en poncho dans un décorum urbain tout aussi crépusculaire. Un transfert en grande partie permit par la bande originale musclée et tendue de Franco Micalizzi (On l'appelle Trinita) digne par instants des meilleures compositions de Lalo Schifrin ! Une œuvre bien bis, souvent bricolée, aux idées pas franchement progressistes, mais pourtant l'un des fleurons de l'Eurocrime.





